Escale chez les Fées pour accueillir le printemps

À l’approche de Beltane, le thé découverte d’avril nous a entraînés sur la trace des fées. Au cours de nos explorations, nous nous sommes demandé qui elles sont, quelles sont leurs origines et leurs fonctions, d’où elles viennent et comment elles ont évolué à travers le temps, pour ensuite voir de quelle manière elles apparaissent et quels sont leurs rôles dans les jeux divinatoires.

 

Dans un premier temps, nous sommes remontés à l’ère préchrétienne et avons observé de quelle façon s’est faite la transition des cultures païennes vers la culture chrétienne. Ainsi, nous avons constaté que dans les sociétés préchrétiennes et en particulier celtiques, la Nature occupait une place centrale, que ce soit au niveau de la vie quotidienne ou du rapport au sacré qu’avaient ces populations. La connaissance de la Nature, de ses cycles, des animaux et des plantes était partie intégrante du mode de vie. L’existence était rythmée par les saisons et les multiples visages de la Nature, qui offrait toutes les richesses dont on avait alors besoin pour se nourrir et se soigner. Dans les multiples facettes qu’ils revêtaient, les dieux incarnaient souvent des aspects de la Nature et en étaient toujours des protecteurs.

En s’imposant, la christianisation établit un nouvel ordre dans la société et dans la manière de concevoir le Monde, et ce qui était jusque-là divinisé s’est vu diabolisé. Dès lors, l’ordre représenté par les villes et leurs institutions vint à s’opposer au chaos incarné par la Nature, la forêt et tout ce qui provenait de la sphère dite sauvage. Hiérarchie, justice et religion régnaient en ville tandis que chaos, désordre, anarchie et croyances diaboliques dominaient les espaces naturels et en particulier la forêt. Les bois devinrent alors le refuge traditionnel des brigands, des hors-la-loi et autres bandits de grand chemin, mais aussi le sanctuaire des anciennes croyances et le lieu d’aventures merveilleuses. Ainsi, les anciens dieux, toujours intrinsèquement liés à la Nature dont ils incarnaient les multiples aspects, s’y réfugièrent eux aussi et le Christianisme les ayant supplantés bien que les croyances païennes subsistaient, ils perdirent en envergure et devinrent peu à peu de ce l’on appelle des dieux diminués. Ils continuèrent à protéger la forêt et la Nature et à en faire un sanctuaire de l’Autre Monde, c’est-à-dire du plan sacré pour les Païens. Avec le temps, la culture chrétienne finit de s’imposer et ces Êtres Surnaturels ne furent plus que des réminiscences d’un monde lointain et merveilleux, tout en étant néanmoins considérés comme terribles et dangereux car païens (et donc diaboliques).

C’est ainsi qu’apparurent peu à peu les Fées telles qu’on les connaît depuis la christianisation et surtout au Moyen Âge. Ces créatures, à la fois belles et terribles, envoûtantes et craintes, n’avaient alors rien à voir avec les petits êtres pas plus hauts que le pouce que l’on connaît à l’Ère Victorienne. Les Fées médiévales sont grandes (souvent plus que les hommes) et belles, et si certains souhaitent à tout prix les rencontrer pour prouver leur valeur et leur courage, elles en sont d’autant plus craintes. En effet, elles mettent celui qui croise leur chemin face à son destin, sur lequel elles ont une influence considérable indépendamment de toute notion de bienveillance ou de malveillance au sens où l’entendent les humains. Elles incarnent les lois de la Nature et non celle des hommes, ce qui explique que le Bien et le Mal tels que les conçoivent les humains sont pour elles un non-sens : ce qui leur importe, c’est l’ordre naturel des choses, celui qui est en harmonie avec le plan sacré et, par conséquent, avec les lois du Monde et de la Nature.

Les intérêts personnels des humains les laissent indifférentes, comme en témoignent par exemple les lais bretons, qui sont des récits poétiques médiévaux dans lesquels des chevaliers partent à l’aventure et rencontrent des Fées. En pénétrant dans la forêt (souvent en traversant un cours d’eau), tous ces chevaliers passent la frontière qui les séparait jusqu’alors de l’Autre Monde, celui des Êtres Surnaturels et donc des Fées. Tous rencontrent une femme belle et envoûtante qui leur confie une quête dont ils vont chercher à s’acquitter. Lorsqu’ils reviennent dans le monde profane, ils sont irrémédiablement changés d’une manière ou d’une autre car on ne revient jamais indemne de l’Autre Monde. Les récits arthuriens – en vers ou en prose – sont eux aussi riches en rencontres féeriques, de même que les récits mythologiques qui circulaient par voie orale jusque-là et qui ont été couchés par écrit au Moyen Âge.

Ce n’est qu’à l’Ère Victorienne que les Fées prirent une autre forme… et surtout une autre stature ! Avec la popularisation des contes et des histoires pour les enfants des familles riches, ces êtres ne furent désormais pas plus hauts que le pouce, à l’image de la Fée Clochette de J.M. Barrie. Les Fées devinrent alors espiègles et facétieuses, farceuses et capricieuses, mais restèrent toujours proches de la Nature et continuèrent de véhiculer une magie d’antan.

 

Une fois ces quelques repères posés, nous avons pu avancer dans nos explorations en examinant de quelle manière ces créatures, qu’elles soient les héritières du temps mythique ou de petits êtres de contes, apparaissent dans les jeux divinatoires et comment elles y sont représentées. La variété de styles et d’univers dépeints par les supports mis en avant a permis de balayer un large panorama tout en continuant d’échanger sur les traditions et le folklore féeriques.

 

Les Arcanes de Morrigann: Thé découverte "Dans le Cercle des Fées" - Avril 2018

 

Parmi les principaux aspects qu’ils déploient, les jeux examinés associent indiscutablement les Fées à la Nature. Ainsi, leur habitat est la forêt ou un espace gouverné par la végétation, et certaines d’entre elles apparaissent même comme des esprits protecteurs de tel ou tel arbre ou plante. Dans tous les cas, les Fées règnent sur le Destin et sont garantes de l’ordre naturel des choses, tantôt en mettant le consultant face à ce vers quoi il se dirige, tantôt en accompagnant le rythme des saisons et la répétition des cycles naturels. Bien sûr, ces éléments sont traités différemment dans les tarots et oracles présentés, mais chaque angle d’approche est intéressant, qu’il soit néo-païen (Wild Wisdom of the Faery Oracle), mythologique (Madame Endora’s Fortune Cards), littéraire (The Stolen Child Tarot), folklorique (The Faeries’ Oracle), ou qu’il mêle mythe, folklore, et imaginaire collectif (Twilight Realm, The Faerie Guidance Oracle, The Victorian Fairy Tarot, Tarot des Fées, Woodland Wisdom Oracle Cards).

 

Je remercie bien chaleureusement les participantes non seulement pour leur présence, mais aussi – et surtout ! – pour l’enthousiasme et la bonne humeur dont elles ont fait preuve tout au long de cette séance. Leurs contributions ont rendu ce thé découverte particulièrement vivant et agréable, et la curiosité qu’elles ont témoignée face aux traditions féeriques a largement aidé à faire connaissance avec les coutumes, les traditions et le folklore qui subsistent encore aujourd’hui dans certaines régions, le tout avec beaucoup d’humour ! Je suis enchantée d’avoir partagé ce moment avec vous ! J’espère que ce thé découverte vous a plu et qu’il vous a donné envie d’approfondir vos connaissances sur ce sujet !

Au plaisir de vous retrouver très bientôt autour d’un thé,
Morrigann

SUR LA PHOTO :
Wild Wisdom of the Faery Oracle (Lucy Cavendish, Selina Fenech). Victoria, AUS: Blue Angel Publishing, 2009.
Twillight Realm: A Tarot of Faery (Beth Wilder). Atglen, PA: Schiffer Publishing, LTD, 2010.
The Faerie Guidance Oracle (Paulina Cassidy). Woodbury, MN: Llewellyn Worldwide, 2012.
The Smith-Waite Centennial Tarot Deck (Arthur Edward Waite, Pamela Colman Smith). Stamford, CT: U.S. Games Systems, Inc., 2009.
Madame Endora’s Fortune Cards (Christine Filipak, Joseph Vargo). Cleveland, OH: Monolith Graphics, 2003.
Woodland Wisdom Oracle Cards (Frances Munro, Peter Pracownik). Stamford, CT: U.S. Games Systems, Inc., 2011.
The Victorian Fairy Tarot (Lunaea Weatherstone, Gary A. Lippincott). Woodbury, MN: Llewellyn Publications, 2013.
Tarot des Fées (Riccardo Minetti, Pietro Alligo, Mara Aghem). Torino : Lo Scarabeo, 2002.
The Stolen Child Tarot (Monica L. Knighton). Self-published, 2013.
The Faeries’ Oracle: Working with the Faeries to Find Insight, Wisdom and Joy (Jessica Macbeth, Brian Froud). New Yok, NY: Simon & Schuster, 2000.

Vous aimez cet article? Partagez-le!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *